Curé BOUCHON

Un « Curé phénomène » issu de la révolution.

De-Christianization in Lorraine, 27 Brumaire an II — 17 November 1793.

Les citoyens de Laître sous Amance de tous âge, de tous sexe et de toute croyance, assemblés dans le lieu du culte sur l’invitation de la Municipalité, le citoyen François Bouchon, curé d’Amance et de Laitre a paru en leur présence en habit national et en bonnet rouge, et s’adressant aux maires et officiers municipaux rangés autour d’un bureau dressé au milieu de l’assemblée les a instruit de ce qui venait de se passer dans le chef-lieu du canton au sujet de l’abolition des anciens préjugés religieux.

Invité à monter à la tribune pour dessiller les yeux des gens faibles et crédules, il y est monté, et prenant la parole, il a rappelé à l’auditoire que depuis plus de deux ans, il n’avait cessé de tonner contre l’imposture dont ses prédécesseurs avaient abusé le peuple toujours si lent à se corriger de ses erreurs, qu’il n’avait pu, sans s’exposer à tourner contre lui-même les armes du fanatisme, lever plus tôt le voile qui dérobait depuis tant de siècles la vérité se levant enfin sur la France.
Il était temps d’ouvrir les yeux à la lumière, de rentrer en soi-même et d’écouter en silence la voix de cette raison éternelle où l’Etre suprême a gravé en caractère ineffaçable ce que l’évangile a de plus sublime, cette maxime que la constitution a consacré, à laquelle le législateur des chrétiens réduit la loi et les prophètes : ne fait pas à un autre ce que tu ne veux pas qui te soit fait.
Que les Juifs et les gentils appelés les premiers au christianisme avaient dénaturé par leurs préjugé religieux la simplicité d’un culte qui n’exige que l’adoration en esprit et en vérité.
Que les cérémonies du Lévitique et les superstitions de l’idolâtrie s’étaient glissées dans l’exercice du culte à la faveur de la crédulité des premiers fidèles, qu’elles s’étaient maintenues par la tyrannie, fortifiée dans les siècles d’ignorance.
Que les réclamations ont été étouffées par les despotismes de la cour de Rome et par un système d’oppression de la part des princes séculiers et ecclésiastiques.
Que les mêmes ombres dont s’est enveloppé Moïse avaient pendant trois siècles entouré le berceau du christianisme, enseveli dans les caveaux, les souterrains, les catacombes.
Que rendant hommage à sa morale il était disposé à n’enseigner que ce qu’elle dit au cœur de tous les hommes qui doivent se conduire non d’après ce qu’ils ignorent mais d’après leur connaissance bien certaine et bien dirigée, etc. (sic).

Ensuite ledit curé s’est transporté au tabernacle, en a tiré un ciboire, et, prenant une hostie à la main, il a demandé de périr sur l’heure si cette hostie renfermait la divinité; il a invité ses ennemis, au cas qu’il en eut dans l’assemblée à réunir leurs vœux pour attirer sur sa tête avant sa sortie du temple les vengeances exercées sur Ona, Coré, Dathan et Abiron, s’il était profanateur.

Personne n’a été témoin d’aucun prodige ni d’aucun miracle. Alors plusieurs des citoyens présents ont consommé les hosties, les ont partagées avec le curé au milieu du plus grand calme et de la fraternité la plus entière.

La municipalité a invité tous les individus présents à certifier ce qu’ils avaient vu et entendu et à s’embrasser républicainement.

Il a été arrêté que les livres servant au ci-devant culte seraient envoyés au District pour aider à faire des cartouches, de même que l’argenterie du Temple et le cuivre pour servir à  la défense de la République.

Qu’une expédition du présent procès verbal serait envoyée à la Convention nationale, une autre au district et une autre à la société populaire de Nancy.

Rédigé, fait, lu et signé à Laitre le jour et un avant dit.

Signé :
Bongard maire.
Petitjean officier municipal
Bouchon curé.

Suivent 81 signatures.

[Editorial note: « Laître sous Amance had about 150 inhabitants in 1793. »]

From  « Annales historiques de la Révolution française », Paris 1924

http://www.bibleexplained.com/revelation/r-seg11-12/r11f-Fr-rev.htm